Le Compte Nickel : un meilleur contrôle des dépenses ?
Premier compte « sans banque », le Compte Nickel a été lancé en 2014 et détient aujourd’hui plus de 260 000 clients au sein d’un réseau de 1300 buralistes agrées en France. La Financière des Paiements Électroniques – à l’origine de ce dispositif – donne le ton avec le slogan « Les bons comptes font les comptes Nickel ». L’un des principaux objectifs du Compte Nickel est d’accompagner les clients dans le contrôle de leurs dépenses, dans la mesure où aucun découvert n’est autorisé. Aujourd’hui, lorsqu’un prospect entre chez son buraliste avec l’intention de souscrire à cette offre, quelles sont ses véritables motivations ? Ce modèle à faibles coûts répond-il aux attentes des clients ?
Un business model inédit : un compte de proximité, en temps réel et sans banque
Avec le Compte Nickel, la Financière des Paiements Électroniques propose un modèle économique atypique dans le paysage bancaire, composé d’une approche terrain avec son réseau de buralistes, et d’une approche technologique avec l’apport de l’informatique en temps réel.
« Nous sommes le seul service bancaire qui ne fasse pas payer les pauvres plus cher que les riches« , précisait récemment Ryad Boulanouar, fondateur du dispositif. Sans possibilité de crédit ni de découvert, les frais de gestion associés à cette offre sont relativement faibles, « deux à trois fois moins chers qu’un compte en banque ordinaire ». De par ses particularités, ce modèle s’adresse principalement à des personnes dont la situation financière est fragile, qui représentent une large part de la population : « un Français sur cinq est susceptible de se retrouver aujourd’hui en situation de fragilité financière et chaque année, la Banque de France enregistre 220.000 dossiers de surendettement ». Ainsi, environ un quart des clients du Compte Nickel sont des demandeurs d’emploi ou perçoivent des « revenus irréguliers ».
Un certain nombre de fonctionnalités proposées par le compte Nickel permettent d’accompagner le client dans le contrôle de ses dépenses : possibilité d’accéder au suivi des opérations de son compte en temps réel, alertes SMS et emails, plafonnement des dépôts, etc. Par exemple, si un client effectue un paiement en magasin, il est averti quelques minutes plus tard par un message sur son téléphone portable du montant de la transaction et du nom du commerçant. Le client suit donc en temps réel l’évolution de ses dépenses et scrute éventuellement les opérations atypiques sur son compte. Aussi, des logiciels d’analyses comportementales permettent de vérifier si les paiements correspondent aux habitudes du client. Toute opération suspicieuse engendre une alerte immédiate. Ce type d’expérience client est donc tout à fait en phase avec les enjeux de contrôle des dépenses, tout comme de lutte contre la fraude.
Des oubliés bancaires… à monsieur et madame tout le monde !
Si les « oubliés bancaires » constituent l’une des principales cibles du Compte Nickel, ce modèle séduit de plus en plus d’autres types de clients : mineurs, jeunes étudiants, salariés, etc. L’aspect « contrôle des dépenses » semble être un argument de poids pour ces nouvelles cibles. « Un vrai compte sans banque et sans surprise » et une « totale maîtrise »: telles sont les promesses affichées sur le site internet du Compte Nickel, destinées aux parents
d’enfants de 12 à 18 ans. Le dispositif propose à cette population un système de « contrôle parental », permettant de suivre les dépenses des enfants.
De plus en plus de français dont la situation financière est « stable »souscrivent également à cette offre. En effet, près de 75% des « clients Nickel » y domicilient leurs revenus, ce qui signifie qu’ils utilisent probablement ce dispositif à titre de « compte principal ». Selon la FPE, ces clients font partie de ceux « qui sont en dépassement d’autorisation de découvert tous les trimestres ». Elle estime ainsi que cette population a été convaincue par l’offre Nickel par l’argument « impossibilité de découvert, donc maîtrise totale des dépenses ».
Par ailleurs, la FPE cherche aussi à séduire les potentiels clients qui ne sont pas « digital natives » et qui souhaiteraient se faire accompagner dans l’utilisation du site internet du Compte Nickel. Cela est rendu possible notamment grâce au service de « tchat » en ligne, animé par une communauté de « clients Nickel » volontaires. Ceux-ci sont de véritables « ambassadeurs » du Compte, chargés de répondre à toutes interrogations relatives au dispositif. Cette mise en relation inédite permet de rassurer les divers utilisateurs du site.
Si le succès du Compte Nickel est indiscutable – les typologies de prospects se diversifient et 750 clients supplémentaires y souscrivent par jour – il reste un acteur de niche et ne constitue pas un réel concurrent pour le système bancaire. Dans la mesure où la FPE est un établissement de « paiement » et non de « crédit », ce dispositif n’a pas vocation à se substituer aux banques. Cependant, il est probable que ce modèle aiguille les acteurs traditionnels vers l’optimisation de leur dispositif d’accompagnement à la maîtrise des dépenses.