Quel avenir pour le crédit Peer to Peer en Chine ?
Le crédit Peer to Peer (ou entre particuliers en français) connait une forte croissance au niveau mondial. En Chine, son essor n’est pas remis en cause par les conditions particulières du marché. Au contraire, sa flexibilité et sa proximité avec les petites entreprises pourraient en faire le moteur d’une nouvelle économie. Explications.
Le crédit P2P, un service en forte croissance
Malgré l’apparente rigidité de l’économie chinoise, le crédit P2P parvient aujourd’hui à se faire une place. Ainsi, selon le Wall Street journal, la somme prêtée sur ces plateformes a atteint en Chine 16,98 milliards de dollars en 2014, ce qui représente une croissance de 300% par rapport à l’année précédente. C’est surtout l’effervescence autour de ces start-ups qui frappe : de nouvelles entreprises sont créées très régulièrement et les montants levés pour les financer sont impressionnants. Ainsi, la plateforme Jimubox a bouclé en avril 2015 une levée de 84 millions de dollars, provenant notamment du britannique Investec Bank.
Les utilisateurs sont au rendez-vous puisqu’on dénombre 23 000 emprunteurs et 2 000 investisseurs en 2015, selon CNBC.
Un environnement favorisant cette croissance
Ce dynamisme est en grande partie lié à la situation très spéciale que connait actuellement l’économie chinoise : grâce au développement récent du pays, de nombreux particuliers souhaitent créer ou développer une entreprise, alors que le secteur bancaire traditionnel n’est que très peu tourné vers les petits prêts. En effet, l’histoire récente l’a plutôt incité à travailler avec de grandes entreprises d’envergure mondiale, en lien avec le gouvernement. Le crédit en P2P présente cet avantage qu’il reste à taille humaine.
Le développement des plateformes de prêts entre particuliers est également favorisé par l’explosion de l’économie du partage en Chine. Ainsi, le Financial Times souligne le fait que de nombreux particuliers empruntent pour lancer une activité économique liée à Internet (par exemple pour acheter une voiture et devenir un chauffeur Uber).
Un système encore imparfait
Cette course au crédit ne se déroule néanmoins pas sans accros. Selon le ministre de la sécurité publique chinois, le nombre d’incidents impliquant une plateforme de prêt en P2P illégale a atteint 8 700 en 2014 , soit une multiplication par 13 par rapport à 2013. En effet, la réglementation est encore faiblement développée pour encadrer cette activité récente. Ainsi le « Credit Score » – indicateur illustrant la capacité d’un individu à rembourser des emprunts – existe mais est bien souvent incomplet.
En résumé, le crédit Peer-to-Peer connait aujourd’hui une croissance impressionnante du fait de son adéquation avec le besoin du marché. Néanmoins, les conditions de pérennisation de son activité ne sont pas réunies. Les enjeux sont pourtant nombreux, tels que la création d’un tissu de petits entrepreneurs ou le renforcement de la consommation intérieure, qui sont autant de facteurs déterminants au moment où la Chine semble se chercher un nouvel modèle économique après celui tourné vers les exportations.
Quels contrastes avec le marché français ?
En France, le marché du crédit en Peer-to-peer se développe, mais reste encore confidentiel. Ainsi, Prêt d’Union – premier organisme de ce type en France – déclare avoir accordé 78 millions d’euros de crédits depuis le premier janvier 2015. Le développement de ces services s’explique par un sentiment d’exclusion des services bancaires, mais également par des frais ou des temps de réponses jugés prohibitifs.
L’intérêt porté au crédit entre particuliers s’inscrit dans le cadre plus large de l’essor des plateformes de crowdfunding en France. Ainsi, on observe de nombreux partenariats noués entre ces dernières et les institutions financières traditionnelles. On peut citer les exemples de BNP Paribas et Ulule ou celui du Crédit Mutuel, actionnaire de Prêt d’Union.
Ce volontarisme s’explique par le développement des FinTech, nouvelles venues dans le domaine des services financiers. Elles ambitionnent de révolutionner le secteur bancaire, comme Uber a pu le faire avec les transports urbains. Le fait de s’associer à ces plateformes est une issue de secours pour les banques en cas de transformation profonde du secteur. Elles y gagnent une capacité à réinventer leurs positionnements sur le marché, au risque de creuser leurs tombes en les finançant.