Fonction conformité, toujours plus haut !
Le montant record de l’amende infligée à BNP Paribas en 2015 par les autorités américaines (près de 9 milliards de dollars) est resté dans tous les esprits. Ce symbole fort, pour sanctionner la violation d’un embargo par la banque française, illustre bien l’évolution du cadre réglementaire, plus lourd et contraignant, auquel sont confrontées aujourd’hui les banques. Et cela n’est pas sans impact sur la fonction conformité qui est en pleine transformation.
Un cadre réglementaire qui se durcit
Partie intégrante du contrôle interne, le rôle de la fonction conformité est de détecter, mesurer et contrôler tout risque de non-respect des lois et des réglementations, et de mettre en place des moyens afin d’en limiter l’impact. A défaut de pouvoir remplir ce rôle, les banques s’exposent à des risques de sanctions lourdes, affectant leur image et engendrant d’importantes pertes commerciales, opérationnelles et d’indépendance. Le rôle de la fonction conformité est donc primordial, d’autant plus qu’elle est aujourd’hui face à un défi de taille : respecter des exigences réglementaires qui évoluent régulièrement.
Les crises financières qui ont secoué le monde depuis 2008 ont révélé des manquements considérables en termes d’éthique et de contrôle, donnant naissance à de nombreuses réglementations plus complexes pour réguler le système et encadrer les pratiques des établissements financiers (MIFID 2, EMIR…).
Cette lourde réglementation a un impact sur l’ensemble de la chaîne de valeur, de la conception des produits jusqu’à leur distribution. Mais plutôt que de l’envisager comme une contrainte, il faudrait voir dans la réglementation un véritable levier de transformation et de performance. Et ceci est d’autant plus vrai lorsque le digital vient servir la conformité.
Le digital au service de la conformité
Le secteur bancaire fait face à des défis cruciaux. D’abord, opérer dans un contexte où la concurrence s’intensifie (FinTech, GAFA…). Ensuite, digitaliser la relation client pour répondre à des comportements clients qui évoluent. Enfin, trouver de nouveaux relais de croissance dans un environnement victime d’une augmentation des coûts suite à une pression réglementaire accrue et qui fait face à des taux d’intérêts bas, qui impactent les marges à la baisse.
Pour relever ces défis, tout en maîtrisant le cadre réglementaire imposé, les banques peuvent s’appuyer sur les nouvelles technologies.
The Economist Intelligence Unit a réalisé une enquête mondiale auprès de 200 sociétés issues du secteur financier : Digital Finance: Meeting ethics and compliance challenges in financial services. Elle a révélé le rôle majeur du digital dans la mutation de la fonction conformité, en démontrant ses capacités à mieux gérer les risques, améliorer les services et la transparence, et ainsi instaurer la confiance.
Les équipes garantes de la conformité ont besoin de fiabiliser et industrialiser le traitement des informations pour permettre une meilleure analyse et un pilotage efficace de l’activité. Les technologies peuvent ainsi intervenir pour la production de reportings pouvant évoluer rapidement face à des exigences réglementaires instables et complexes. Le type d’informations à communiquer, ainsi que la quantité de données nécessaires qui explose, poussent à mettre en place de nouvelles solutions et méthodes pour les analyser et traiter.
De plus, les données constituent un actif stratégique des banques et il est indispensable de penser leur gestion, gouvernance et qualité pour réduire les coûts de fonctionnement et limiter les risques stratégiques et de non-conformité.
Par ailleurs, dans un monde où les techniques de fraude sont de plus en plus sophistiquées, des solutions Big data, de Data Analytics ou encore la Blockchain vont pouvoir jouer un rôle clé. En effet, elles permettront de diversifier considérablement les sources de données pour générer des analyses prédictives, ainsi que des alertes rapides et efficaces.
L’usage du digital au service de la conformité doit cependant se faire en veillant à certaines limites. L’étude de The Economist Intelligence Unit a montré qu’un des plus grands problèmes de la régulation réside dans la sauvegarde et la gestion des données : 58% des entreprises interrogées citent ce problème comme étant essentiel. Il faut assurer la sécurité des données sensibles, pour ne pas se mettre en faute notamment vis-à-vis de la .
Une nouvelle organisation et culture
La réglementation amène aujourd’hui la conformité à occuper une place plus importante dans les banques. On observe en ce sens des investissements plus conséquents dans la fonction : l’enquête de The Economist Intelligence Unit souligne que 65% des institutions bancaires prévoient d’accroître d’au moins 10% leurs investissements dans les projets de mise en conformité. Le Crédit Agricole a lui un budget prévu de 1 milliard d’euros pour renforcer ses dispositifs de conformité à horizon 2020.
La mutation de la fonction conformité est aussi visible sur le plan culturel et humain : 43% des entreprises consultées disent avoir introduit de nouvelles politiques d’entreprise et codes de conduites (The Economist Intelligence Unit). En outre, elle redonne au Compliance Officer une légitimité considérable avec un élargissement de son périmètre d’activités.
Enfin, la conformité a longtemps souffert d’une connotation trop juridique, alors qu’elle a un rôle distinct : la fonction juridique a un rôle opérationnel quand la fonction conformité joue plutôt un rôle de contrôle et de conseil. Ces deux fonctions sont néanmoins très complémentaires et permettent ensemble de construire un système cohérent de maîtrise des risques.
Les RegTech proposent aux entreprises d’externaliser leurs fonctions de conformité et de gestion des risques, en s’appuyant sur des technologies innovantes pour répondre aux besoins. Il s’agit d’une véritable alternative pour les sociétés souhaitant se recentrer sur leur cœur de métier, permettant plus d’agilité et de réduire les barrières à l’entrée du secteur en ôtant le frein lié à la recherche de compétences en gestion des risques et conformité.
Les nombreux bouleversements réglementaires ont mis la fonction conformité des banques à rude épreuve. Afin de faire de cette réglementation un levier de performance et de développement, elle opère une transformation profonde, tant sur le plan organisationnel que culturel, et le digital peut l’aider à atteindre cet objectif.