Les agrégateurs de comptes, quels changements ?
Une mutation majeure se profile dans le secteur bancaire. De nouveaux acteurs de la finance, apparus discrètement ces dernières années, cherchent en effet à bousculer radicalement la relation entre les banques et leurs clients. Ces agrégateurs sont de petites start-up qui fournissent à un client, via une application mobile, une vue consolidée de l’ensemble de ses comptes bancaires, qu’ils soient domiciliés dans un seul ou plusieurs établissements. Leur ADN est de faciliter la vie du consommateur, en lui proposant également des services ergonomiques de gestion de leur budget.
Un cadre réglementaire qui leur est favorable…
La directive européenne DSP2 ouvre le marché des paiements aux agrégateurs de compte qui facilitent la vie des clients : les banques donneront à ces acteurs un accès illimité et sans conditions aux données bancaires des clients.
Ces plateformes pourront alors accéder beaucoup plus aisément aux comptes de leurs clients. Aujourd’hui, le client doit fournir à l’agrégateur ses codes d’accès à sa banque en ligne pour bénéficier de ces services. Une démarche qui décourage une grande partie des consommateurs qui ont pourtant téléchargé l’application. Une fois la directive européenne entrée en vigueur, les banques auront l’obligation de transmettre à ces nouveaux acteurs les informations des comptes de leurs clients.
La DSP2 vise à augmenter la concurrence sur le marché du paiement tout en favorisant l’innovation financière. En effet, les agrégateurs auront désormais la possibilité de proposer des services et des fonctionnalités innovantes à leurs clients. Ainsi, l’espace client de l’agrégateur est voué à devenir l’interface privilégiée du client au détriment de celles développées par les banques traditionnelles.
…favorisant l’émergence de nouveaux acteurs…
Le potentiel de développement des agrégateurs de compte en France est difficilement discutable. En 2013, 43% des Français détenaient un compte dans au moins deux banques différentes. Une tendance en faveur des plates-formes d’agrégation qui ont déjà convaincu des millions d’utilisateurs. Deux acteurs dominent le marché : Bankin et Linxo, qui revendiquent respectivement 1,5 million et 1,2 million de clients. Mais bien d’autres start-up se sont déjà lancées, comme Fiduceo (rachetée par Boursorama), Iswigo ou Budget Insight (en BtoB).
…et de nouveaux services
Pour les agrégateurs, les deux prochaines années seront charnières pour développer de nouveaux services. Au-delà de la simple consultation de comptes, nombreux sont ceux qui espèrent proposer des services de conseil budgétaire et surtout de permettre à l’utilisateur de réaliser des opérations bancaires – virements, souscriptions, etc. – directement depuis leurs applications. Des services qui peuvent augmenter leurs revenus, qui sont aujourd’hui exclusivement constitués par la publicité poussée sur leurs applications et par une poignée d’abonnements aux versions payantes de leurs services.
Aiguillonnées par ces start-ups, certaines banques ont déjà réagi. Crédit Mutuel Arkéa et, plus récemment, le Crédit Agricole sont entrés au capital de Linxo. L’agrégateur pourra alors naturellement proposer ses services aux différentes entités de la Banque verte (de la banque en ligne BforBank à LCL en passant par les caisses régionales qui le souhaitent). Une manière pour les banques de conserver le contrôle de la relation avec leurs clients.
La directive européenne DSP2 pose donc les fondations d’un marché des paiements aux règles inédites. Alors que certaines banques usent de diverses stratégies pour ajuster leur modèle au nouvel environnement, d’autres, à l’inverse, s’assurent de leur conformité à une réglementation qui évolue constamment. L’objectif étant d’éviter d’investir dans des dispositifs coûteux dont la pertinence n’est pas pleinement avérée.
Dans un tel contexte, il semble légitime de prêter une attention particulière à la façon dont seront maîtrisés les risques liés à la sécurité des moyens de paiement et du client. Ce dernier est désormais celui qui provoque la mise en place d’une nouvelle dynamique sur le marché à travers des exigences toujours plus pointues et des besoins constamment changeants.