Banques traditionnelles et Fintechs : une expérience client différente mais complémentaire
Le secteur bancaire n’a pas été épargné par l’engouement autour des nouvelles technologies et des nouveaux services qui en découlent. Parallèlement, l’essor et la croissance des fintechs annoncent qu’un virage dans le secteur bancaire est amorcé. Valeur ajoutée avérée, l’expérience client représente un enjeu pour ces fintechs qui se veulent disruptives du marché bancaire traditionnel.
Effectivement, le succès d’une relation client réussie est tributaire de la confiance entre la banque et son client. De même, une expérience client est réussie si sa perception finale du client est d’être « gagnant » et de bénéficier d’un produit qui lui corresponde et à sa juste valeur. Si l’expérience client qui résulte des fintechs séduit un bon nombre de consommateurs, en quoi ces dernières se démarquent-elles des banques traditionnelles ? Quelles sont alors les réactions des banques dites « historiques » ?
En premier lieu, les banques dites traditionnelles semblent déterminées à rattraper leur retard sur les Fintechs en innovant avec la proposition de solutions digitalisées à leurs clients (accès et gestion des comptes sur internet, souscriptions de contrats en ligne, conversations avec un conseiller, gestion des moyens de paiement, création et suivi de budgets, …). Mais les innovations proposées sont souvent limitées à leur fonction et manquent d’intuition, et les différences avec une Fintech demeurent visibles pour les clients. Effectivement, une banque traditionnelle reste sur une organisation verticale tournée autour de ses produits historiques : prêts, dépôts, épargne, placements et paiement. La performance même de la banque est jugée sur la quantité de produits vendus. Un constat : la confiance des français se dégrade régulièrement depuis 2008, et aujourd’hui, 35% des français affirment avoir confiance dans les banques. L’expérience client n’est pas en reste et ne répond pas tout à fait aux attentes des clients. En cause : des frais de tenue de compte jugés trop élevés, des agents commerciaux plutôt que des conseillers en interlocuteurs, et parfois, les conditions des banques qui sont jugées trop peu transparentes. Cependant, les français tiennent encore aux agences et aux conseillers : pour un projet immobilier ou un crédit plus de 50% des français estiment ressentir le besoin d’un conseiller.
L’expérience client est un point où les banques en ligne se différencient, à l’image d’ING Direct reconnue pour son service client. Elles ont les avantages disruptifs attendus des clients en présentant une série de service en ligne et des faibles coûts, tout en restant sur un schéma de banque traditionnel.
Qu’en est-il de l’expérience client proposée par les fintechs ?
À la différence des banques, les fintechs sont fondées sur l’expérience client à travers l’utilisation des technologies. Elles offrent des services sur mesure, adaptés aux besoins du client. Se sentant écoutés et maitre de leurs choix concernant leur argent, de plus en plus de clients particuliers plébiscitent les fintechs. Elles sont pensées pour le client et parfois même par lui, à l’image de Fidor. La néo banque allemande rachetée par la BPCE en 2016 et attendue cette année sur le marché français, dispose d’une plateforme de crowdfunding et d’une forte communauté, afin d’appuyer sur la dimension participative. Ce qui séduit dans ces nouvelles structures, ce sont la fiabilité malgré la simplicité, l’innovation, la rapidité d’accéder au produit, et la personnalisation. Tout paraît moins contraignant et ce qu’elle propose, c’est une consommation personnalisée d’un produit accessible rapidement. L’opinion publique parle d’elle-même : 25% de français se disent prêts à quitter leur banque traditionnelle pour une fintech. L’acquisition de client se fait là où la cible se trouve : sur les réseaux sociaux, et autres canaux digitaux. Effectivement, les interfaces proposées sont plus intuitives, mieux organisées, et le client ne se perd pas dans l’information.
Une différence et limite réside avec les banques traditionnelles : l’absence de relation avec le client final. Et comme énoncé précédemment, cela peut s’avérer important lors de moments clés de la vie d’un client. Un autre point, limitant dans l’expérience client est la proposition de service. Aujourd’hui, une fintech ne propose pas de nouveaux produits en tant que tels, les produits restent basiques et similaires à la banque traditionnelle. De plus, toutes les possibilités en termes d’activité financière, ne sont pas représentées au sein d’une même fintech. À l’exemple de Yomoni qui ne propose que du placement financier. Mais la start-up se différencie en proposant de l’épargne pour tous et en misant sur la transparence de ses placements et des risques encourus par chacun.
Fortes de ce constat et de leurs limites, les banques et les fintechs travaillent à améliorer l’expérience de leurs clients lors de l’utilisation de leurs services.
C’est pourquoi les banques procèdent à des projets de refonte cruciaux, comme la réinvention du métier de conseiller. Acteur de l’expérience client et de plus en plus challengé, les banques cherchent à redéfinir son rôle. Effectivement, l’étude Efma réalisée en 2016 sur le rôle du conseiller bancaire affirme la nécessité d’une redéfinition de son rôle. Ainsi, son rôle basculerait vers celui de Community manager afin de fournir le meilleur service possible à ses clients, eux-mêmes de plus en plus connectés et informés. L’étude soulève également des interrogations sur le remplacement de l’interlocuteur humain avec des chatbots par exemple comme c’est déjà le cas pour Orange Bank et le Crédit Mutuel avec Watson, et sur la valorisation du client. Les banques agissent également sur leur organisation interne et n’hésitent pas se lancer dans des acquisitions de fintechs. Le rachat de Simple par la BBVA en 2014 afin d’accélérer la présence de la banque mobile sur le marché illustre ce phénomène. Le choix d’un partenariat peut également s’avérer stratégique pour les deux entités. Effectivement, avec la loi DSP2, concernant la régulation des moyens de paiement et de la sécurité des données des clients, le partenariat semble être une option gagnant-gagnant afin de limiter l’impact de cette régulation. Afin de limiter des déséquilibres organisationnels et le choc des cultures entre ces deux entités, ce type d’acquisition peut passer par des structures annexes, à l’exemple de Barclays Accelerator. La banque propose en partenariat avec Techstars un programme de 13 semaines destiné à des fintechs. Ce modèle permet de ne pas brider les fintechs par des organisations plus lourdes.
De leur côté, les fintechs profitent de leur agilité et de leur réactivité pour étoffer leurs gammes de produits à l’image de Revolut, initialement positionné sur les transferts d’argent à l’international, la société propose désormais une solution de crédit et des produits d’assurance. La start-up affirme pouvoir déployer un projet en trois ou quatre mois, ce qui est difficilement concurrençable par les banques traditionnelles. Cette agilité d’exécution permet aux sociétés d’évoluer rapidement et de toujours mieux répondre aux exigences et besoins de leurs clients. Toujours dans cette logique d’élargissement de gamme, les alliances entre fintechs sont une alternative envisageable, notamment pour la proposition de crédit à l’image de Raisin et Younited ou encore de Iwoca et Tide. L’intérêt supplémentaire d’une alliance est de pouvoir monter en compétence sur la connaissance client.
La révolution fintech, aura-t-elle lieu ? Cela fait un moment que les fintechs sont sur le marché et hormis le marché du paiement, les promesses de changement du paysage bancaire s’estompent. Il semble important de comparer ce qui est comparable : les fintechs n’ont pas le même poids économique que les banques. De plus, la situation n’est pas critique pour les banques, à la vue des 4,5% des français qui changent de banque chaque année, selon l’étude Mercereau de 2014. Même si la loi Macron de 2017 facilite aujourd’hui la mobilité des clients, le paysage bancaire ne devrait donc pas changer brutalement. Les banques traditionnelles ont conscience de leur besoin d’adaptation et de modernisation incarné par les fintechs. Elles travaillent à rattraper leur retard en collaborant avec ces dernières. Une collaboration et un équilibre bien établis sembleraient bénéfiques aux deux entités, afin de construire la banque de demain.