Comment les banques traditionnelles se réinventent grâce à l’innovation collective et implicative ?
L’apparition de nouveaux acteurs sur le marché bancaire a profondément bouleversé le secteur. On a d’abord pensé que les banques historiques allaient se faire distancer, pour graduellement assister à leur transformation et adaptation à ces nombreuses mutations.
Un nouveau terrain de jeu
Les banques en ligne d’abord, les Fintech ensuite, ont contribué à relever le niveau d’exigence des clients et modifier leurs comportements, en repensant l’expérience client contraignant ainsi les banques historiques à amorcer des transformations. Les grands acteurs de la place ont, dans leur majorité, compris la nécessité de miser sur une démarche collective et implicative. Cette vision permet d’exploiter ces transformations plutôt que de les subir.
Certaines banques ont donc investi dans la création d’ « Innovation Labs » : un espace de co-création combinant ressources internes et partenaires externes, avec pour objectif commun, favoriser l’innovation. Pour dynamiser ses activités en Afrique subsaharienne, la Société Générale a par exemple lancé en 2016 son Innovation Lab, cherchant à outiller les collaborateurs aux idées novatrices et sensibiliser à l’innovation collaborative. En organisant un concours d’innovation ouvert à tous les collaborateurs de ses filiales africaines, la Société Générale a pu détecter trois projets porteurs, sur lesquels travaillent désormais les équipes du Lab. Ces projets devraient être déployés auprès de toutes les filiales africaines.
Du côté de la Banque Postale, un certain nombre de clients font partie intégrante des équipes du Lab ; ils se voient en effet associés à l’élaboration de nouveaux produits et services. Pour leur application d’authentification par biométrie vocale (Talk to Pay), 650 clients et collaborateurs ont pu participer à la phase d’expérimentation via le Lab. La Banque de France crée également son Lab, étant d’ailleurs la première Banque Centrale à nommer un Chief Digital Officier, entre autre chargé du pilotage de ce projet. Pour autant, ce dernier précise que leur Lab n’a pas vocation à être un incubateur.
Créer son incubateur, c’est aussi une façon d’exploiter la transformation du secteur. Le « Village By CA » du Crédit Agricole offre ainsi « un cadre, un réseau et des outils » aux startups à potentiel. La structure permet aux startups une insertion facilitée sur le marché, et une ouverture sur l’international, puisque le Village By CA possède des locaux dans 25 villes à l’étranger. En retour, les collaborateurs du Crédit Agricole se voient portés « dans une dynamique d’innovation permanente. ». Ces « Village By CA » sont répartis en région : Paris, Caen, Orléans, St Brieuc… Ce maillage régional favorise le foisonnement de projets et les initiatives locales, permettant également de créer un écosystème innovant : une opportunité pour les régions cherchant à se dynamiser.
BNP Paribas a lancé de son côté un « accélérateur Fintech/Assurtech » : le groupe accueille un ensemble de start-up sélectionnées au préalable. Un binôme est ensuite formé avec une équipe métiers de la BNPP, le but étant d’optimiser au maximum le lancement sur le marché. Les startups bénéficient – ici aussi – du réseau, des outils, et de l’accompagnement de la banque, tandis que la BNP Paribas profite de cette collaboration pour en faire bénéficier ses métiers.
Des illustrations de ces partenariats
Commeon simplifie le mécénat et reprend les codes des plateformes de financement participatif et des applications de matching. La relation entre Commeon et le Crédit Agricole illustre l’appui que fournit la banque à ses startups incubées au Village. En effet, en Septembre 2017, le Crédit Agricole s’engage à doubler la mise de chaque don versé sur Commeon, au profit de la rénovation du patrimoine : un moyen de rendre l’application virale et d’en accroitre la visibilité.
Du côté de PayCar, la startup qui permet une transaction sécurisée lors de l’achat d’une voiture d’occasion, l’accompagnement de la BNP Paribas a été un vrai tremplin. D’abord incubée au sein de l’Accélérateur de l’Atelier de la BNP Paribas, la startup est désormais installée dans les locaux du Bon Coin. La BNPP avait entre-temps investit dans l’entreprise. Aujourd’hui, PayCar est présenté comme une offre de la banque, proposée en agence et sur son site internet, parmi son panel « d’offres et moyens de paiement ».
Dans l’ensemble aujourd’hui, la plupart des banques s’équipent à la fois d’un incubateur (« accélérateur » « village by »…) et à la fois d’un Lab interne. Depuis que ces structures existent, la mise sur le marché réussie de ses startups incubées au sein des banques, ainsi que les projets novateurs naissant dans les labs pour s’exporter vers tous les métiers, mènent à croire que ces partenariats sont des succès.
Beaucoup pourtant pensaient que les banques allaient se faire distancer. C’était sans compter la stratégie des banques qui, avant de se laisser doubler, stimulent l’innovation en interne voire se lancent dans l’acquisition externe (entrée au capital de Linxo par le Crédit Agricole, Leetchi et Pumpkin rachetés par le Crédit Mutuel Arkéa …) afin de s’assurer du maintien de leur compétitivité sur le marché.