Fintech : le pavé dans la mare ?

Le premier trimestre 2016 a été riche en actualité sur le sujet des Fintech. Le 28 janvier dernier, le Paris Fintech Forum a réuni à la même table acteurs institutionnels, membres de l’association France Fintech et des représentants du régulateur.

Les débats ont convergé vers un positionnement commun : les acteurs institutionnels ne peuvent plus ignorer la pression des nouveaux entrants. Bien que les offres des Fintech soient positionnées sur des niches, et ne viennent donc concurrencer les institutionnels que sur un segment très limité de leur offre, elles vont pousser les institutionnels à refondre leur relation client.

Le développement actuel des Fintech n’est pas sans rappeler l’arrivée de Free sur le marché des télécoms. Avant le lancement de l’offre Free, ce secteur très concentré était caractérisé par une qualité perçue faible au regard des tarifs pratiqués, des offres déconnectées de l’évolution des usages client et une expérience client globalement peu satisfaisante.

Les Fintech semblent aujourd’hui lancer le même pavé dans la mare. Même si leur dénominateur commun est le digital, la disruption introduite par les Fintech relève plus du domaine culturel que du domaine technologique. En d’autres termes les Fintech proposent de nouveaux usages, pour répondre au besoin du client, et non pour répondre au besoin de vendre un produit ou un service. Et cette nouvelle proposition de valeur est susceptible de provoquer une remise en question de certains modèles établis.

  • Comment l’industrie traditionnelle pourrait-elle continuer à assortir son offre de produits et services d’un empilement de frais, à l’heure où des robo-advisors promettent une tarification transparente et des frais réduits afin de maximiser la performance du client?
  • Comment justifier un parcours client fastidieux, dû à une absence de véritable stratégie multicanal intégrée, lorsque des Fintech proposent des parcours complètement digitaux, des temps de réponse réduits et une gestion administrative simplifiée ?
  • Comment ne pas proposer de service d’agrégation des comptes et de visualisation budgétaire satisfaisant, clair et lisible, alors même que l’ensemble des comptes du client est détenu au sein d’un même établissement ?

L’enjeu pour l’industrie est de remettre le client au centre de la relation. Toutefois, s’il semble acquis que la révolution des usages est en marche, les acteurs institutionnels ont de nombreux atouts dans leur manche pour s’adapter : une notoriété indiscutable, une base client solide, des ressources financières importantes, un réseau historique et une offre diversifiée.

Il semble que l’industrie passe actuellement le cap de l’observation à la « coopétition », et développe diverses stratégies pour s’équiper : partenariat, investissement, sous-traitance, rachat voire même création de Fintech.

Enfin, une étude récente sur les attentes des Français en matière d’innovations financières permet de nuancer les constats présentés dans cet édito. En effet, la notoriété et l’appétence du grand public pour ces nouveaux services reste très limitée. Cela se traduit par des taux d’utilisation des services financiers innovants encore faibles (entre 2 et 9% des répondants selon le produit/service)… mais qui ne sauraient qu’augmenter.

Emilie Van Lierde – consultante dans la practice Business Transformation – Banque et Assurance