Transférer 15.000 euros en moins de 10 secondes, 24h sur 24, 7 jours sur 7, 365 jours par an deviendra possible dès la fin de l’année 2017. Le virement instantané, dont l’enjeu est de taille en Europe, permettra d’effectuer un paiement à destination d’un commerçant ou d’un proche et de voir l’opération s’exécuter seulement quelques secondes après sur le compte du créditeur. Actuellement d’un jour ouvré, le délai d’exécution d’un virement sera dorénavant de quelques secondes – même en cas de fermeture des banques.

Ce nouveau système, envisagé par la Banque Centrale Européenne, se déroule dans le cadre du projet SEPA, un projet initié en 2002 par les établissements bancaires dans le but d’harmoniser les paiements européens.

Quels enjeux pour l’écosystème ?

L’avènement du virement instantané contraint les banques, les prestataires de paiement et les systèmes de compensation de chaque pays à s’adapter rigoureusement et à refondre leurs interfaces. Selon Nicolas Chatillon, directeur du développement fonctions transverses du groupe BPCE, « ce sera un changement majeur pour tous les organismes impliqués dans la banque de flux qui vont devoir reconfigurer leurs systèmes ». C’est pourquoi les plus sensibles à la réforme, les systèmes de compensation, ont tous répondu à l’appel d’offre lancé par l’Union Européenne pour jouer un rôle clé dans la définition du standard qui sera appliqué.  En France, c’est le système Stet.core qui en aura la responsabilité.

Face à une éclosion phénoménale de nouvelles solutions concurrentes de paiements instantanés, les banques se doivent elles aussi d’évoluer rapidement. Mais face à un tel « chamboulement » elles semblent rester plutôt sereines et positives. C’est l’occasion pour elles d’évoluer face aux nouvelles innovations des fintech toujours plus agiles et rapides qu’elles sur le marché du paiement en ligne.

Quant aux consommateurs, leurs usages seront aussi bouleversés. Ils auront à disposition un nouveau moyen de payer sans délai, alors que jusqu’ici, seule la carte bancaire le leur permettait. Ce nouveau système permettra donc de payer chez son commerçant en m-paiement ou en peer-to-peer, non pas avec sa carte bancaire mais simplement en se branchant à son compte bancaire. Une solution gratuite ? Chez BPCE, on explique que « les virements instantanés pourraient être dans un premier temps proposés sous la forme d’un produit supplémentaire pour les consommateurs qui en ont besoin ».

Le paiement numérique qui gagne du terrain d’année en année (avec une augmentation de 10,1% dépassant les 426 milliards en 2015 selon le world payment report 2016) devrait donc s’envoler tout particulièrement ces prochaines années. Mais ce nouveau modèle, que l’UE surnomme « cashless cash » remet donc en question l’existence des chèques et surtout de la carte bancaire.

 Une pratique déjà courante

Certains pays comme le Royaume Uni ou le Danemark ont déjà réformé leur système bancaire interne afin de proposer des solutions abouties en matière de paiement instantané. Par exemple au Royaume Uni, l’instant payment est proposé depuis 2008 aux particuliers et entreprises grâce au système Faster Payments Service (FPS). La limite de virement est fixée à 100 000 livres sterling. Au Danemark, le paiement en quasi temps réel a été lancé en 2014 avec la possibilité de transférer jusqu’à 500 000 couronnes danoises.

Un nouvel enjeu de rentabilité 

Tandis que les moyens de paiement actuels sont de réelles sources de revenus pour les banques (la monétique est globalement la rétribution le plus rentable pour les banques), l’arrivée d’une telle innovation représente une véritable menace : la perte de revenus créée par les transactions en virement instantané. Pour y remédier, les banques ont tout intérêt à faire évoluer leur business model en devenant de véritables acteurs du m-paiement et ainsi répondre aux nouveaux besoins de leurs clients.